Droga Pani Krystyno,
film TATARAK wchodzi 17 lutego 2010 na ekrany kin francuskich. Sa juz nawet pierwsze recenzje!
Ciekawe, jak bedzie przez TAMTA publicznosc odbierany?
Pozdrawiam Pania serdecznie
Maciek
mardi 2 février 2010
Le soir au-dessus des joncs
Tatarak - La critique
Le temps, la mort, le chagrin : Wajda fixe des mots de deuil et de douleur sur la pellicule, dans une élégie sobre et picturale, illuminée par une actrice bouleversante.
L’argument : Dans une chambre d’hôtel, Krysyna Janda, actrice, parle des derniers moments de la vie de son mari, le chef-opérateur Edward Klosinski. Elle s’apprête à tourner le nouveau film d’Andrzej Wajda : Tatarak. Elle y joue le rôle de Marta, une femme d’âge mûr qui reprend goût à la vie aux côtés de Bogus, un jeune homme qui lui rappelle ses fils disparus. Ces deux histoires, celle de Krystyna et celle de Marta, se fondent autour d’une même douleur : la perte de l’être aimé.
Notre avis : Ce qui frappait les contemporains de l’invention de la photographie, et plus tard du cinématographe, c’était la capacité de faire du film le dépositaire d’une mémoire personnelle, affective ou familiale, celle de la petite histoire qui compte parfois plus pour nos vies que la grande. Le cinéma est un art de sorcier parce qu’il fait danser sur l’écran des pantins auxquels il semble donner une âme ; mais inversement, il prend aussi sa force terrifiante de ce qu’il nous ramène à une méditation sur la mort. Cette sagesse du temps qui passe - tour à tour créateur et destructeur - est au coeur de Tatarak, film d’un double chagrin, celui, romanesque et écorché, au coeur de l’intrigue qu’il décrit, et celui, pérenne au-delà de la fiction, de l’actrice Krystyna Janda, qui chante la mort de son compagnon Edward Klosinski. Dans trois longs plans-séquences, tournés en caméra fixe, trois huis-clos oppressants dont la beauté plastique n’a d’égale que la mélancolie, c’est une femme vidée de ses larmes qui se confie, et les mots, bien qu’écrits et préparés - la « vérité derrière le film » demeurant encore un film -, ont chacun la justesse propre à la douleur. On sent ici tout le travail de dépouillement opéré par Wajda, sorte d’ascèse délivrée de tout pathos, jusqu’à atteindre un sentiment fragile de nudité et d’intime.
Cette vérité personnelle se révèle pourtant sans cesse une menace, palpable notamment dans les scènes où le réalisateur apparaît à l’écran, non comme un prestidigitateur ou un démiurge - précisément capable de renverser l’ordre de la vie et de la mort, de manipuler ses figures pour hypnotiser à la fois ses comédiens et le spectateur -, mais dans une impuissance bouleversante, la voix chevrotante et le regard désarmé. Devant la détresse de Krystyna Janda (dont on peine à louer « le jeu », tant la frontière entre confession tremblante et interprétation semble mince), le cinéaste ne peut rien, sauf tenter de dire, sur un ton profondément élégiaque, le parfum angoissant de la mort qu’est censé dégager « l’herbe tatare » dont il est question dans le titre. Wajda compose en mineur une oeuvre dans la filiation des « vanités » picturales - ces tableaux où des objets tels que le sablier ou la rose nous ramènent à l’évanescence du moment présent et de l’existence humaine -, refusant de verser dans le symbolisme effusif afin de privilégier la touche stylistique. Il y a dans Tatarak un écho du romantisme en ce que la nature même, filmée par esquisses, semble refléter un état mélancolique de l’âme et se teinter de caractères humains : pluie, gris du ciel et lumière froide se répondent dans le drame vécu par Krystyna-Marta. En certains instants, le film se dévoile, s’éclaire, comme dans ce moment où le personnage évoque la « honte » éprouvée par celui qui est resté vivant, vis-à-vis des morts ; et l’on peut se demander si la partition Tatarak n’est pas une humble oraison funèbre dans la sphère intime, de la même manière que le bouleversant Katyn donnait une voix aux disparus de la mémoire. Ni homme d’Etat, ni moralisateur, Andrzej Wajda s’attache à rendre au cinéma son opacité ambiguë des premiers temps, et à en faire un miroir de l’âme aussi bien qu’un memento mori.
Camille Lugan
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